Par Frédéric Maltais (avec la collaboration de Guillaume Thomas)
Il y a 10 ans, en 2007, une histoire incroyable a eu lieu dans le monde des quilles, une performance exceptionnelle mettant en vedette le quilleur Guillaume Thomas. Peu de gens connaissent cette histoire alors j’ai décidé de vous la partager. Merci à Guillaume Thomas qui a pris le temps de répondre à mes questions dans le cadre de la rédaction de cet article.
Contexte
Guillaume Thomas est un quilleur possédant un talent que peu de joueurs peuvent se vanter d’avoir. À l’âge de 13 ans en 1996, il se qualifie déjà pour une finale de la catégorie junior, à l’époque où tous les joueurs de 18 ans et moins évoluaient ensemble dans la même catégorie. Un an plus tard, à sa première année d’éligibilité pour la classe ouverte adulte, il se qualifie à plusieurs reprises pour la télévision. En carrière, il cumule au-delà de 60 présences à la télévision en plus d’une séquence de deux parties parfaites de suite devant les caméras.
Alors qu’il est au sommet de sa forme en 2007, Guillaume entend parler d’un sport pratiqué au sud de la frontière, le « duckpin bowling » semblable et différent à la fois de nos petites quilles québécoises. Ce sport est pratiqué avec les mêmes boules mais les quilles ne possèdent pas de bande de caoutchouc et n’ont pas de cordes. La plus grande difficulté est qu’il n’y a presque aucune huile sur l’allée (voir l’article sur les différents types de quilles publié dans la section blogue)
Guillaume est à l’époque en mauvais terme avec les Salons de Quilles Associés du Québec (SQAQ) et ne participe plus aux tournois organisés. Il décide donc de profiter de l’occasion pour tenter sa chance, en compagnie du quilleur André Duclos.
Le tournoi le plus prestigieux
En 2007, le « Eastern Duckpin Classic ” en est déjà à sa 77e édition. C’est donc dire que le tournoi a débuté au début des années 30, sans jamais s’arrêter. Lors de sa meilleure année, en 1969, l’événement attire 388 joueurs différents. Il s’agit tu tournoi qui existe depuis le plus grand nombre d’années sans jamais s’arrêter et il est sans contredit le plus prestigieux tournoi de duckpin en Amérique du Nord.
La préparation
Comme les allées n’ont pas d’huile, il peut être très difficile de s’adapter, de trouver le bon lancer et la bonne position sur l’allée. Cependant, Guillaume est un joueur qui a toujours eu une grande facilité à s’adapter aux différents types d’allées. Il était capable de lancer tous les effets, toutes les vitesses de boules et naturellement, il a aussi toujours eu beaucoup de révolution dans son lancer. Il a donc utilisé une boule rapide sans trop d’effet, misant sur sa précision, une de ses plus grandes forces. Il s’efforçait surtout de récupérer le plus de quilles possible sur son 2e et 3 lancer.
Il faut dire que Guillaume est arrivé au milieu de la semaine pour pratiquer chacune des allées. Comme à son habitude lors des tournois au Québec, il prit le temps de noter la façon de jouer dans un cahier.
Là pour gagner
Lors des premiers lancers de Guillaume, les joueurs présents le trouvaient plutôt bizarre avec son lancer renversé. Les joueurs américains préconisent une boule extrêmement rapide, presque comme un lanceur de softball. Alors qu’une moyenne de 140 est la plupart du temps suffisante pour remporter une bourse et qu’on peut espérer remporter le tournoi autour de 150 de moyenne en 12 parties, Guillaume débute son tournoi avec deux parties consécutives de 180. On peut dire qu’à partir de ce moment, les spectateurs ont commencé à le prendre au sérieux.
Il raconte même après ses 2 premières parties, un fan club de spectateurs américains le suivait en arrière des allées. Ils étaient d’ailleurs tous étonnés de savoir que c’était la première fois qu’il pratiquait ce sport. Malgré le fait qu’il était une recrue, Guillaume affirme qu’il visait la victoire avant même de commencer le tournois, il était là pour gagner quoi que les autres puissent en penser.
Il termine la première journée de compétition avec un score de 945 en 6 parties pour 157,5 de moyenne. Bon pour le 3 rang, à 6 quilles seulement du meneur. Il avait toutefois 6 autres parties à jouer le lendemain. Étant dans le coût jusqu’à la toute fin, Guillaume enregistrait malheureusement ses 3 plus petites parties du tournois à la toute fin. Malgré tout, celui-ci est passé à un seul lancer de remporter le mythique tournoi. Avec sa deuxième place à 5 quilles du champion, on peut dire que Guillaume a réalisé tout un exploit.
Ayant moi-même participé au tournoi même 10 ans plus tard, je peux vous dire que les joueurs se souviennent de Guillaume Thomas.
La suite des choses
Fait étonnant, Guillaume n’est jamais retourné au Eastern Classic. Il est retourné aux États-Unis à deux reprises pour participer aux tournois du Circuit Professionnel (DPBA Tour). Son expérience a toutefois été négative alors que certains propriétaires lui ont refusé de se déplacer entre les allées lors de sa pratique, comme on le fait ici au Québec.
Depuis 2011, Guillaume a eu de graves problèmes de santé et malheureusement a dû mettre fin à ma carrière de quilleur. Il affirme qu’il n’est pas impossible qu’il revienne pour aider le sport dans un certain rôle en dehors des allées. Cependant sa carrière en tant que joueur est bel et bien terminée. Il a eu beaucoup de plaisirs à jouer et se souviens avec nostalgie de ses belles années avec les Daniel Racicot, Marc Tardif, Dennis Rousseau, Michel Jourdenais, Léon Thivierge et les autres.
Depuis sa participation en 2007, plusieurs quilleurs du Québec ont tenté leur chance. Bien que la majorité ait eu beaucoup de plaisir et que certains ont même terminé dans les bourses, personne n’a été capable de véritablement s’approcher de la performance de Guillaume. Nous pouvons tout de même noter que quelques joueurs comme André Duclos, Dave Duchesneau et Philippe Bernier sont parvenues à terminer dans les bourses. Philippe est le seul joueur de petites quilles à avoir atteint la ronde des match-play du circuit professionnel DPBA en 2013. À ma connaissance, Pierre-Luc Bouchard est le seul joueur à avoir réussi une partie supérieur à 200, ce qui est vraiment tout un exploit. Quelques joueurs québécois de 5-quilles ont toutefois réussi d’excellentes performances. Sylvain Bercier de Gatineau a déjà remporté un tournoi et Maxime Lafrenière a déjà terminé premier des qualifications.
Pour les gens à l’aise en anglais, un article a paru en 2010, faisant mention de la participation des joueurs Canadiens aux tournois de duckpin bowling. Voici le lien : http://www.northamericanbowling.com/Articles/5-CANADA1.HTML
Pour voir la feuille de résultat du tournoi de 2007, veuillez cliquer ici